Au XXIe siècle encore: la rhétorique de la lutte contre l’échec scolaire et de l’adaptabilité sociale

La notion de soutien à la parentalité s’est imposée dans le champ professionnel de la petite enfance en France, depuis la Conférence de la famille du 12 juin 1998. A l’issue de cette conférence, les réseaux d’écoute, d’appui et d’accompagnement des parents (REAAP) sont mis en place dès 1999. A cet égard, la circulaire du 9 mars 1999 relative aux REAAP[1] est ambiguë : elle fait explicitement référence à la circulaire interministérielle du 6 novembre 1998 « sur la mise en œuvre des décisions adoptées par le Conseil de sécurité intérieur du 8 juin 1998 ». Or, la fin du titre de cette circulaire a été omise. Lapsus ou suppression guère anodine : le complément « relative à la délinquance des mineurs » a disparu. Dès lors, l’article N° 1 de la Charte des REAAP se lit avec une tout autre coloration : « Valoriser prioritairement les rôles et les compétences des parents : responsabilité et autorité, confiance en soi, transmission de l’histoire familiale, élaboration de repères, protection et développement de l’enfant… » Sans l’afficher explicitement, cette Charte semble bien s’inscrire dans le champ d’une politique de protection de l’enfance.

Les pouvoirs publics, en adressant les REAAP à tous les parents, ont contribué à (re)construire, à (re)produire, une représentation de la parentalité comme risque social. Même si, bien évidemment, le postulat de base contenu dans la circulaire du 9 mars est juste : « […] tous les parents sont susceptibles de rencontrer des difficultés. » Le parent, défini antérieurement comme protecteur de l’enfant, est repositionné comme facteur de risque supposé.

En 2010, un comité national de soutien à la parentalité est créé. Sa première mission est de « contribuer à la conception, à la mise en œuvre et au suivi de la politique et des mesures de soutien à la parentalité définies par l’Etat et les organismes de la branche famille de la sécurité sociale »[2]. Il reprend les recommandations du Conseil de l’Europe, adoptées le 13 décembre 2006, relatives aux politiques visant à soutenir la « parentalité positive », renforçant cette idée de risque porté par la seule parentalité, le qualificatif de « positive » sous-tendant qu’il y a bien une « parentalité négative ». Des stages, des conférences, des ateliers sont mis en place pour former des « parents positifs ». Un filon pour les maisons d’édition qui publient des guides[3] et pour les coachs qui prodiguent des conseils. La parentalité est considérée comme « un art » qui s’apprend, qui se performe, avec des méthodes ou des recettes clé en main. Derrière cette notion bien molle de « parentalité positive », se cache le fantasme de pouvoir vivre sans erreur et sans colère, de conforter le destin de son enfant en ayant les bonnes attitudes. Il ne suffit pourtant pas d’être un parent informé, détenteur du « bon savoir » pour être un parent « performant ». Ces politiques fabriquent la croyance que le « bon parent », la « bonne parentalité », fabriquerait l’enfant idéal : épanoui, bien dans sa peau, intelligent, sociable, en réussite scolaire, pratiquant le sport et les arts, autonome et obéissant, etc., renvoyant le parent à lui-même et à sa propre culpabilité en cas de difficultés ou d’échec. Le mythe de Frankenstein nous rappelle que la créature échappe toujours à son créateur (Meirieu, 1996) et que ce désir de toute-puissance est vain. Ce faisant, on oublie que l’exercice de la parentalité est aussi affaire de contexte et de société, que les parents sont soumis différemment à des pressions économiques, sociales, psychologiques, etc., qui ont des effets sur leurs conditions d’existence et sur leur façon et leur possibilité d’être parents. Plus récemment, une « nouvelle politique de soutien à la parentalité » est invoquée par l’Etat, avec la création de « Maison des familles »[4].

De tout temps, les lieux d’accueil de la petite enfance se sont fait l’écho de ces orientations et de ces politiques d’adaptation. A travers celles-ci, ressurgissent autrement formulées, ces velléités de prévention et de dépistage de la délinquance dès la petite enfance. Ce modèle éducatif d’une prévention économique, dans toute sa logique néolibérale, s’oppose avec persistance à un modèle de prévention soignante, issu de la psychopédagogie et des pédagogies dites interactives (Cadart, 2016), issues du XXe siècle.

Par exemple, dans la revue professionnelle EJE Journal, P. Duval et L. Rameau, présentent et promeuvent l’Institut Petite Enfance Boris Cyrulnik, qui se positionne pour la création d’une filière petite enfance, avec en sous-titre « attachements, cognition et éducation ». L’intérêt de cette initiative est argumenté en ces termes :

« Il semble évident aujourd’hui que le développement personnel de chaque enfant débute avec les nombreuses expériences relationnelles qu’il mène dans les premières années de sa vie et que ces dernières sont essentielles à ses apprentissages ultérieurs et donc à son employabilité future. Si l’enfant peut acquérir de solides bases affectives et cognitives dès la petite enfance, alors il a de grandes chances de mener ses apprentissages avec facilité et efficacité, ce qui réduit d’autant son risque de décrochage scolaire. C’est ainsi que nous pouvons espérer diminuer la charge sociétale liée aux dépenses des services sociaux, des services de santé et des services judiciaires qui doivent prendre en charge des enfants et des jeunes adultes déviants. »[5]

Est-ce là un renouvellement paradigmatique de la philanthropie sociale du XIXe siècle ? Une instrumentalisation des finalités éducatives au nom d’une réussite scolaire à venir, au nom d’une société normée, policée ? Au risque d’accentuer la pression sur les attendus parentaux vis-à-vis des enfants et de développer d’autres effets pathogènes. Ce type d’argumentaire rejoint les ambitions de prévention et de dépistage de la délinquance dès la petite enfance issues du rapport Bénisti[6], contre lesquelles s’était constitué le collectif Pas de 0 de conduite (2006 ; 2011) et qu’analyse, à l’échelle internationale, le documentaire de Marie-Pierre Jaury[7]. Ambitions qui ressurgissent au travers des rapports du think tank Terra Nova[8], avec le même type de ­propositions que le rapport Bénisti, soit par exemple la mise en œuvre du programme de stimulation linguistique de Michel Zorman, « Parler bambin » (mais aussi des stages de responsabilité parentale). Celui-ci se développe dans les crèches municipales de plusieurs villes de France, à partir de 2005. Son efficacité scientifique (Nocus et al., 2018) n’est guère discutée dans ces rapports – oubliant que le langage n’est pas un simple outil technique de communication, réduit à sa dimension opérationnelle, mais avant tout support, et nourri de relations significatives[9]. Ces orientations sont reprises en 2018, dans le rapport de lutte contre la pauvreté émanant du Ministère des solidarités[10] qui promeut le programme « Parler Bambin » afin de « stimuler le développement langagier des enfants de 3 à 36 mois » comme « levier d’égalité des chances en matière de réussite scolaire, lorsque l’on sait qu’à l’entrée en CP il y a un écart de 1000 mots maîtrisés entre les enfants selon leur origine sociale » (p. 65). Ce rapport stipule encore que « le contenu de la formation des 600 000 professionnels de la petite enfance est en cours de refonte pour renforcer la qualité de l’accueil en mettant l’accent, dès le plus jeune âge, sur l’apprentissage de la langue française ». Il s’agit de mettre en œuvre des « interactions “éducatives” spécifiques permettant de mettre en fonctionnement et de stimuler efficacement le langage des très jeunes enfants et d’améliorer significativement leurs compétences langagières ». Il s’agit encore « de sensibiliser les familles à la nécessité de parler le plus possible avec leur enfant et de parler avec un langage précis et de plus en plus diversifié pour permettre à l’enfant de comprendre, de conceptualiser puis de verbaliser le monde qui l’entoure ». « Parler Bambin est une expérimentation innovante qui vise à stimuler le langage des enfants dès le plus jeune âge en crèche, lutter contre les inégalités sociales et l’échec scolaire », affirme encore le rapport.

Pourtant, la question de l’échec scolaire est plus complexe que le seul rapport au langage, même si celui-ci est important concernant cette problématique. Mais le développement du langage ne s’enseigne pas par des exercices répétitifs de désignation d’objets ou d’actions : il se construit à un rythme singulier, dans une relation et une interaction significatives pour l’enfant, par où transitent émotions, désir, symbolisation, intérêt réciproque et subjectivité. C’est-à-dire, surtout, le langage s’acquiert, il surgit même, il ne s’apprend pas, tout comme la marche. Bien des scientifiques ont explicité comment le langage vient aux enfants, à travers le tissage de liens affectifs et de plaisirs partagés…

S’autorisant des programmes d’éducation compensatoire des handicaps socioculturels des années 1970 aux USA, outils de prévention précoce et de lutte contre les inégalités et l’échec scolaire, le think tank Terra Nova prône un modèle de « crèches à haute qualité éducative », sous cette consensuelle rhétorique de lutte contre les inégalités sociales[11]. Bien des auteurs critiquent pourtant ce que l’on peut résumer à un ethnocentrisme de classe, à une vision erronée et à une pédagogie simpliste de l’apprentissage du langage, paré d’arguments et de jargons scientifiques. Mais aussi ses effets délétères : pressions liées à l’évaluation des enfants, stigmatisation des enfants (les « petits parleurs » que doivent identifier les professionnel·le·s appliquant le programme « Parler Bambin ») et des familles, perpétuant les inégalités du lien entre rapport au savoir et rapport au pouvoir, disqualification des savoirs professionnels et des compétences parentales dans ce domaine (Ben Soussan et Rayna, 2018). Ce programme fait partie des dispositifs[12] au sens de Foucault (Garnier, 2018). Sa « logique d’investissement social basée sur la recherche scientifique » (Terra Nova, 2017), soit les sciences cognitives et les neurosciences, ignore l’histoire de cette institution, ses conditions d’exercice professionnel, ses pédagogies mises en œuvre – ouvertes sur les pratiques culturelles et artistiques – les développements issus de la psychologie clinique, depuis le XXe siècle, et jusqu’au rapport Giampino[13], semblant « réinventer la poudre »[14].

Diagnostiquer les « petits parleurs », l’hyperactivité, les « TOP » (troubles oppositionnels avec provocation) dès la petite enfance, la belle affaire ! (« Chez » le jeune enfant, on oublie vite que le « non » vient avant le « oui ».)

Ce faisant, ces dispositifs ignorent les inégalités fondamentales qui structurent nos sociétés, et prétendent, comme les philanthropes à l’âge de la fondation des crèches (Bouve, 2010), agir sur leurs effets, mais non sur leurs causes. Lutter contre la pauvreté et les inégalités sociales nécessite un autre engagement et commence par décomposer les mécanismes inégalitaires : accès à l’éducation, marché du travail et du logement, redistributions qui resserrent les inégalités de revenus et de patrimoine, taxation des salaires et des marchés financiers, etc. Ou comment opère le mythe – ou la chimère – de l’égalité des chances, quand il ne se fonde que sur le projet de réformer l’enfant – et sa famille – sans vouloir modifier les fondements capitalistes de la société, à l’origine de ces inégalités structurelles. Les technocraties éducatives sont toujours en marche, à l’opposé d’une démarche de clinique éducative, à l’opposé d’une pédagogie sociale. L’enfant n’est plus ici un sujet, mais est objet d’une rééducation. Tout comme ses parents. Et les lieux d’accueil de la petite enfance sont aujourd’hui bien positionnés comme antichambres de l’école maternelle[15] – qui elle-même devient obligatoire (Garnier, 2019) – où les jeunes enfants deviennent des apprentis-élèves.

Cette conception normative et libérale de la qualité éducative est contestable. Ne la laissons pas s’imposer ainsi par des pseudo-experts sous le prétexte bien pensant de lutte contre l’échec scolaire : les éducateurs de la petite enfance sont en capacité de mettre en œuvre leur intelligence professionnelle et des pratiques pensées dans une dimension intersubjective et humaniste[16], autrement propice pour faire « œuvre de soi-même » (en référence à Pestalozzi). « Quelle image avons-nous de l’enfant ? » invite à se questionner le réseau Enfants d’Europe dans sa Déclaration « Vers une approche européenne de la petite enfance » (2008). Je pourrais ajouter : « A quoi, vers quoi souhaitons-nous éduquer les enfants ? » Voulons-nous former des enfants obéissants, adaptables ? Souhaitons-nous des enfants capables de jugement critique sur notre société de consommation ? La crèche doit-elle être le lieu de préparation à l’école maternelle ? Doit-elle éduquer les enfants en vue de leur liberté, de leur autonomie, de leur créativité ? (Et de quelle liberté, autonomie ou créativité s’agit-il ? !) A travers les politiques et les curricula petite enfance, de façon sous-jacente ou explicite, se lisent les représentations de l’enfant et de la famille, mais aussi de la société et de la place de l’individu dans la société. Il y a bien deux visées possibles dans l’acte d’éduquer : émanciper ou assujettir. Certains ont déjà choisi : produire de futurs adultes autonomes, performants, employables et adaptés. Au nom du bien de l’enfant, au nom du bien de la société, de tout temps se produit une instrumentalisation des visées éducatives des institutions de l’enfance et se lisent les tensions et les ambiguïtés sociétales et politiques à l’œuvre. Pour autant, familles et professionnel·le·s y agissent et réagissent différemment, et toutes les institutions ne sont pas assignées à se conformer à la lettre de cette instrumentalisation. Résistons ! : « Refuser de faire cristalliser l’enfant trop tôt en individu typifié, en modèle personnologique stéréotypé, cela ne veut pas dire qu’on va fabriquer des révolutionnaires en herbe (…), mais des individus qui, tout en acquérant une richesse d’expression propre, irrécupérables par les technologies du pouvoir, pourront, quand ils le voudront, prendre les habits que le système de production, à un moment ou à un autre, leur tendra, sans qu’ils leur collent à la peau, sans qu’ils se mettent à désirer les carcans répressifs pour eux-mêmes. »[17]

P.S. : C’est bien le chemin qu’a pris la Revue [petite] enfance depuis 10 ans, par ses numéros thématiques engagés, jusque dans ses illustrations éloignées des mièvreries censées représenter la petite enfance, par l’expression et l’articulation d’une pensée ouverte tant aux chercheur·e·s qu’aux professionnel·le·s… (Tout acte pédagogique est un acte politique). Bon anniversaire ! 

Catherine Bouve

Bibliographie

Bouve, Catherine (2010). L’utopie des crèches françaises au XIXe siècle: un pari sur l’enfant pauvre, Essai socio-historique, Bern, Peter Lang.

Ben Soussan P. et S. Rayna (dir.) 2018. Le programme «Parler bambin»: enjeux et controverses, Toulouse, Erès.

Cadart, M.-L. 2016. « Petite enfance et prévention précoce : un débat de société. Du Conseil National de la résistance à Pas de 0 de conduite », dans Pache Huber V., C.-E. De Suremain et E. Guillermet (dir.), Production institutionnelle de l’enfance. Déclinaisons locales et pratiques d’acteurs, Liège, PU de Liège, pp. 103-121.

Collectif. 2006. Pas de 0 de conduite pour les enfants de moins de trois ans, Toulouse, Erès.

Collectif Pas de 0 de conduite. 2011. Les enfants au carré? Une prévention qui ne tourne pas rond!, Toulouse, Erès.

Garnier, P. (2019), « L’instruction obligatoire dès 3 ans : quels enjeux pédagogiques, sociaux et politiques ? », site internet Les pros de la petite enfance, publié le 5 mai 2019, https://lesprosdelapetiteenfance.fr / formation-droits / les-politiques-petite-enfance / linstruction-obligatoire-des-3-ans-quels-enjeux-pedagogiques-sociaux-et-politiques

Garnier, P. (2018), « La petite enfance assiégée : essai d’analyse socio-historique d’un dispositif », dans Ben Soussan P. et S. Rayna (dir.) 2018. Le programme «Parler bambin»: enjeux et controverses, Toulouse, Erès, pp. 227-245.

Meirieu, Philippe (1996), Frankenstein pédagogue, Issy-les-Moulineaux, ESF.

Nocus I., A. Florin, P. Guimard, F. Lacroix, A. Lainé. 2018. « Evaluation d’un dispositif d’aide au développement du langage dans des multi-accueils municipaux. Discussion d’une absence d’effet », Devenir, 30(2), pp. 147-173.

 

[1]-Circulaire interministérielle DIF / DGAS / DIV / DPM n°1999 / 153 du 9 mars 1999 relative aux réseaux d’écoute, d’appui et d’accompagnement des parents. http://www.sante.gouv.fr / fichiers / bo / 1999 / 99-11 / a0110762.htm

[2]-Décret du 2 novembre 2010. Ce comité est présidé par le ministre chargé de la Famille.

[3]-Par exemple, l’éditeur Les Arènes a ouvert une collection sur la parentalité positive.

[4]-Rapport Stratégie nationale de prévention et de lutte contre la pauvreté, Investir dans les solidarités pour l’émancipation de tous, Ministère des Solidarités et de la Santé, Délégation interministérielle à la prévention et à la lutte contre la pauvreté, oct. 2018, p. 47.

[5]-N° 43, oct.-nov. 2013 et N° 44, déc. 2013-janv. 2014, pp. 54-55.

[6]-Rapport de la Commission Prévention du groupe d’étude parlementaire sur la sécurité intérieure, Jacques Alain Bénisti, député du Val-de-Marne, 2004.

[7]L’enfance sous contrôle, documentaire Arte-Point du jour, 2010.

[8]La lutte contre les inégalités commence dans les crèches, janvier 2014 ; Investissons dans la petite enfance – L’égalité des chances se joue avant la maternelle, mai 2017.

[9]-Pour une présentation des modalités et une approche critique de ce programme, cf. Ben Soussan et Rayna (2018).

[10]-Rapport Stratégie nationale, op. cit., oct. 2018, p. 117.

[11]-L’ambition dépasse même cet objectif, pour s’étendre à une dimension sanitaire de lutte contre le tabagisme, lorsque le rapport Terra Nova (2014) s’appuie sur le programme Abecederian, pour « démontrer » que 61% des jeunes enfants ayant suivi le programme sont devenus non-fumeurs, contre 41% pour ceux qui n’y ont pas participé ou à une dimension de contrôle social lorsqu’il s’appuie sur le Perry Preschool Project pour indiquer que 40% des femmes de 27 ans ayant bénéficié de ce programme sont mariées, contre 8% pour le groupe témoin – au XIXe siècle, les crèches avaient aussi pour vocation de lutter contre le concubinage et la criminalité – et que le nombre d’arrestations à 27 ans est « plus de deux fois supérieur » au groupe ayant bénéficié du programme, pour le groupe témoin n’en ayant pas bénéficié (Terra Nova, 2017). Relevons encore qu’ici, comme dans l’argumentaire du projet des crèches au XIXe siècle, le concubinage et la criminalité sont étrangement associés, comme si le premier faisait le lit du second.

[12]-Qui plus est, dispositifs commercialisés et rentables. Dans ce sens, nous relevons que l’un des coauteurs du rapport Terra Nova de 2017, Florent de Bodman, est aussi responsable du programme national « Parler Bambin ».

[13]Développement du jeune enfant, Modes d’accueil Formation des professionnels, rapport à la ministre des Familles, de l’Enfance et des Droits des Femmes, mai 2016 et Cadre national d’accueil de la petite enfance publié en 2017 par le même ministère. Ce travail de référence a fait l’objet d’une large concertation ; il est cité dans le rapport Terra Nova, mais celui-ci ne s’en inspire pas pour autant.

[14]-Le programme « Jeux d’enfants », proposé dans le rapport Terra Nova de 2017 et développé dans une ville de France, laisse pantois – tant sa pauvreté interactive et imaginative est affligeante – dans les exemples donnés : « Jeu “Imiter les actions” – Enfants entre 0 et 1 an : taper sur une casserole avec une cuillère : demander à l’enfant de taper avec sa cuillère de la même manière. S’il le fait, lui dire : « Tu viens de faire la même chose que moi, bravo ». Penser à d’autres actions qu’il peut imiter et qui seront amusantes pour tous les deux. L’objectif est d’aider l’enfant à imiter fréquemment afin d’apprendre » (p. 28). Les professionnel·le·s savent que les enfants entreprennent des actions d’imitation autrement plus riches et spontanées. Mais ce faisant, ce type de programme méconnaît et réduit les compétences et les initiatives des professionnel·le·s, participant à leur disqualification pour les transformer en exécutants de prescriptions.

[15]-Pour rappel, « 600 000 professionnels formés en quatre ans dans une logique de continuum éducatif, en lien avec les Assises de la maternelle » est donné comme objectif par le Rapport Stratégie nationale de prévention et de lutte contre la pauvreté, op. cit., p. 66.

[16]-Cf. à ce sujet Revue [petite] enfance, La qualité, N°113, janvier 2014 ; C. Bouve, « La qualité d’accueil de la petite enfance, entre normativité et intersubjectivité », Revue Spirale, N°82, juin 2017, pp. 44-51.

[17]-F. Guattari, “Les crèches et l’initiation”, dans : CERFI, Les gardes d’enfants de 0 à 3 ans comme surface d’inscription des relations entre la famille et le champ social, Paris, Fontenay-sous-Bois, janv. 1975.

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